Report on the dissolving of the Belgian Senate and the upcoming elections. Consequences of a conservative, catholic or liberal future prime minister are discussed. The Belgian political system is praised in spite of differences between Catholics and Liberals, Flemish and Walloons.
Excellence Dans ma lettre n° 17/139 A, j’ai eu l’honneur de vous rendre compte des circonstances qui ont amené la dissolution du Sénat ou Chambre- haute de Belgique. Je viens compléter aujourd’hui cet exposé. Les nouvelles élections pour le Sénat n’ont eu rien de bien satisfaisant pour le ministère Rogier-Frère. Il est vrai, que dans la capital, ainsi que dans les autres grandes villes du Royaume, la majorité s’est prononcée en faveur des
des candidats ministériels, mais, par contre, dans les villes de second ordre, dans les petites communes et dans les arrondissements ruraux, le ministère à été battu : sur la masse générale des électeurs, une majorité environ huit mille voix à été acquise aux candidats de l’opposition. Ce résultat est d’autant plus remarquable que le Gouvernement, disposant de tous les fonction- naires, grands et petits, depuis le garde- champêtre jusqu’au gouverneur de province, exerce naturellement une immense pression sur le corps électoral. Dès que le résultat des élections a été connu, on a recommencé à parler de la retraite du ministère ; mais la grande difficulté c’est de trouver à le remplacer. Un ministère conservateur ou Catholique est impossible d’ici
d’ici à longtemps, à moins que la réaction ne triomphe complètement en France et en Allemagne. Un ministère libéral-modéré est difficile, sinon à former, au moins à organiser d’une manière durable. Le parti libéral-modéré n’existe pas encore bien clairement: beaucoup d’hommes, qui appartiennent plus au moins à cette nuance, hésitent à se séparer complètement du cabinet actuel et de ses amis, de peur de faciliter par cette scission, le retour des conservateurs au pouvoir. Par un motif analogue, un grand nombre d’électeurs se sont abstenus de voter : ne voulant pas donner leur voix en ministère, qu’ils désapprouvent, et ne voulant pas davantage contribuer
contribuer au triomphe des Conservateurs, ils sont restés neutres dans la lutte. Quant au Roi, il est fort préoccupé de cette situation ; il aimerait naturellement beaucoup mieux près de lui un ministère conservateur que des hommes sortis des clubs libéraux; mais il sait parfaitement que ces hommes seraient très-dangereux dans l’opposition, tandis que l’opposition des conservateurs ne peut en aucun cas être fort belliqueuse. Le Roi préfère donc infiniment avoir Mm. Frère, Rogier et Tesch au pouvoir que de les voir le transformer en tribuns du peuple, et surtout à la veille des crises que nous promet l’année 1852
1852. Aussi le Roi caresse ses Ministres; il déclare à qui veut l’entendre qu’il désire les conserver: que l’opposition du Sénat n’a été qu’un malentendu. [onbekende afkorting] C’est au milieu de ces dispositions, que s’est faite, il y a trois jours, par le Ro,i l’ouverture de la session législative . Cette cérémonie a été marquée par un temps affreux. Le Roi est arrivé a cheval à l’assemblée, trempé par une pluie glaciale. Il paraît que cela l’avait mis un peu de mauvaise humeur : la lecture du discours du Trône s’en est ressentie. Ce discours, qui, le matin meme, était encore en discussion dans le Conseil parce que le Roi refusait d’y laisser insérer deux ou trois phrases qui lui semblaient trop
trop vives, ce discours, dis-je n’avait été copié qu’au dernier moment, de façon qu’en le lisant, le Roi était obligé de chercher ses mots, de s’arrêter, de bégayer : tout cela produisait un effet malheureux sur les assistants. Tout le monde est retourné chez soi, grelotant et contrarié _ J’ai l’honneur d’adresser ci-joint à Votre Excellence un exemplaire du discours Royal. Dans un couple de jours aura lieu la discussion de l’adresse en réponse à ce discours. Le ministère paraît décidé à poser immédiatement la question de confiance, dans les deux Chambres. C’est, au fond, ce qu’il a de mieux à faire. S’il procède
procède avec ménagement et ne se laisse pas entraîner encore une fois par la passion, il est probable qu’il se maintiendra, en attendant les événements extérieurs. Quoiqu’il en soit de toutes ces petites crises, la Belgique, aux yeux de l’observateur sérieux, est dans une position fâcheuse. Les têtes commencent à tourner ici, comme dans le reste de l’Europe. Ce petit pays qui, par la sagesse de ses institutions politiques, par les admirables progrès de son industrie et de son agriculture, par l’organisation de ses écoles en tout genre, de ses hôpitaux, de ses prisons, de ses établissements de bienfaisance peut servir de modèle à ses voisins, et surtout à la France; ce pays qui
qui avait si heureusement traversé la tempête de 1848, mais qui aujourd’hui a tant besoin d’union pour recevoir le choc des événements qui se préparent autour de lui; ce pays se laisse entraîner aux divisions de deux partis qui se détestent et se persécutent ; et, comme si ce n’était pas assez de ces haines de partis, de ces luttes entre Catholiques et Libéraux, les dernières élections communales (pour le renouvellement des conseils municipaux) ont réveillé les antipathies de race qui existent d’ancienne date entre les Flamands et les Wallons. Ceux-ci, qui sont Gaulois , comme les Français, leurs voisins, se rapprochent singulièrement de ceux-ci par la légèreté du caractère, tandis
tandis que les Flamands par leurs goûts plus sérieux, leur littérature et leur langue, se rapprochent naturellement des Hollandais et des Allemands, qui appartiennent à la même famille de peuples. Si l’on n’y prend garde, cet antagonisme entre Wallons et Flamands, qui depuis 1848, s’était considérablement amoindri, peut se réveiller avec énergie à la première occasion, et causer la ruine de la nationalité belge. Malheureusement le Roi, qui a beaucoup de sens pour juger les affaires des autres peuples, ne comprend pas toujours fort bien celles de la Belgique. S’il l’eût voulu il aurait pu acquérir une immense popularité
popularité, s’il eût pu se résigner à vivre bourgeoisement à se mêler au peuple à élever comme Louis-Philippe, ses enfants aves ceux de ses sujets. Au lieu de cela, il s’est toujours tenu à l’écart, raide et compassé, ne paraissant jamais au dehors qu’en équipage de gala ou avec force aide de camp et officiers d’ordonnance, et ne recevant qu’officiellement ou quasi-officiellement. Tout cela ne va nullement à l’esprit de ce peuple bourgeois. Il en résulte que le Roi est estimé, mais rien de plus : on le salue respectueusement, quand on le salue, mais avec un respect froid et indifférent. Pour la Reine, c’était toute autre chose : Elle
Elle était populaire parce qu’elle allait au cœur du peuple, à ceux qui souffraient et pleuraient; aussi la Reine était adorée tandis que le Roi est uniquement envisagé comme une chose dont on a besoin : voilà pourquoi on la garde. - Triste siècle que celui où tout est pesé, mesuré, apprécié d’après sa valeur d’utilité, et où le génie de l’homme semble prendre plaisir à détruire tout prestige, à abaisser toute grandeur, à glacer tout élan, à tarir tout enthousiasme, tout dévouement ! Je prie Votre Excellence de
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Consulted online at Ottoman Diplomats: Letters From the Imperial Legation in Brussels (1849–1914) (2014 Edition), Centre for Political History (PoHis), University of Antwerp, <http://dighum.uantwerpen.be/ottomandiplomats/>.